Un décret du 18 janvier 2019 marquerait-il une étape décisive dans la simplification des procédures notamment de marchés publics ?
L'article L. 113-13 du code des relations entre le public et l'administrationmarque t-il vraiment la fin de la lourdeur administrative pour les opérateurs économique et les associations ? Depuis le 7 octobre 2016, c’est en effet en principe, pour la commande publique, aux acheteurs publics qu’il revient de rechercher les informations ou données nécessaires au traitement des offres déposée par les candidats à l’attribution d’un marché public.
Cet article prévoit que :
« Lorsque les informations ou données nécessaires pour traiter la demande présentée par une personne ou la déclaration transmise par celle-ci peuvent être obtenues directement auprès d'une autre administration, dans les conditions prévues aux articles L. 114-8 et L. 114-9, la personne ou son représentant atteste sur l'honneur de l'exactitude des informations déclarées. Cette attestation se substitue à la production de pièces justificatives. »
Issu de la loi n°2016-1321 du 7 octobre 2016, cet article attendait – et nous aussi –, la publication du décret qui fixant « la liste des pièces que les personnes n'ont plus à produire. »
C’est désormais chose faite depuis le 20 janvier dernier : le décret n° 2019-33 du 18 janvier 2019 (publié au JORF du 20 janvier 2019) fixe clairement la liste des pièces justificatives que les entreprises et les organismes à but non lucratif ne sont plus tenus de produire à l'appui des procédures de commande publique notamment (marchés publics et concessions), pour ce qui concerne la constitution du dossier de candidature, mais également pour les dossiers relatifs aux demandes de subventions.
Etape importante dans le processus de simplification administrative
Cette évolution constitue évidemment un allègement plus que bienvenu de l’élaboration du dossier de candidature des opérateurs économiques et des associations, notamment au regard de la fameuse attestation de régularité fiscale n° 3666-SD qui, suite à la réforme des marchés publics de 2015 ne se fait plus au 31 décembre de l’année précédant la date d’envoi de l’avis de marché.
En pratique et depuis l’année dernière, la situation de régularité pour une partie des opérateurs économiques est appréciée au dernier jour du mois précédant la demande de délivrance de l'attestation. En conséquence, les entreprises sont amenées à effectuer des demandes d'attestations depuis leur compte fiscal ou auprès de leur service gestionnaire tous les mois afin d’être à jour.
Pourtant, un processus de simplification de la procédure avait été engagé en 2016 avec notamment deux dispositions particulières.
- D’une part, les dispositions de l’article 68 du décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics aux termes duquel l’acheteur peut décider d’examiner les offres avant les candidatures. Ce système a fait largement gagner en efficacité les acheteurs publics qui évitent alors d’« éplucher » les dossiers de candidature de tous les candidats,et ne vérifier l’aptitude que des seuls candidats ayant présenté les meilleures offres a posteriori.
- D’autre part, les dispositions prévues aux articles 51 et 53 du mêmedécret prévoit la mise en place du dispositif « Dites-le nous une fois ».
Ce dispositif permet aux candidats de ne plus fournir les documents que l’acheteur peut obtenir lorsqu’un système électronique de mise à disposition des informations administré par un organisme officiel existe.
C’est dans ce cadre a d’abord été pris l’arrêté du 29 mars 2017 (publié au JORF du 31 mars 2017) modifiant l’arrêté du 25 mai 2016 fixant la liste des impôts, taxes, contributions ou cotisations sociales donnant lieu à la délivrance de certificats pour l’attribution de marchés publics et de contrats de concession.
Or, cette mesure de simplification était loin d’être optimale puisqu’elle restait subordonnée à une condition : le profil d’acheteur[1]sur lequel la candidature permettant la mise à disposition d’informations doit être administré par un organisme officiel. Les profils d’acheteurs disposant le cas échéant d’un raccordement à l’API ENTREPRISE2[2]permettent ainsi de mettre en œuvre le principe du « Dites-le nous une fois ».
Ce système de production d’attestations diverses et variées qui restait jusqu’à maintenant particulièrement lourd malgré les tentatives de simplification, semble enfin arriver à son terme avec l’avènement de toutes les conditions d’application de l'article L. 113-13 du code des relations entre le public et l'administration.
Listes des pièces dispensées de communication
Cet article désormais impose notamment aux acheteurs publics de prendre en charge, par eux-mêmes, la recherche des informations, données et pièces diverses relatives aux candidats et nécessaire à la prise en compte de leur candidature.
Ce décret du 18 janvier 2019 vient enfin parachever ce dispositif en fixant la liste des pièces justificatives que les entreprises et les organismes à but non lucratif ne sont plus tenus de produire à l'appui des procédures relatives aux marchés publics, pour ce qui concerne la constitution du dossier de candidature et aux aides publiques, soit :
- L'attestation de régularité fiscale
- Les déclarations de résultats soumis aux bénéfices industriels et commerciaux
- Les déclarations de bénéfices non commerciaux
- Les déclarations de résultats soumis aux bénéfices agricoles
- Les déclarations de résultats soumis à l'impôt sur les sociétés
- Les déclarations pour les sociétés mères et les filiales de groupe
- L'extrait d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés et les statuts
- Les attestations de régularité sociale et de vigilance
- La carte professionnelle d'entrepreneur de travaux publics
- Le certificat attestant la régularité de la situation de l'employeur au regard de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés
Acheteurs publics : ne tardez pas à vous inscrire sur l'API nationale
Ce décret tend à enfin permettre à la plupart des acheteurs de disposer directement des attestations fiscales et sociales grâce à l’accès à la base documentaire d’une API nationale (acronyme de Application Programming Interface) sur api.gouv.fr(https://api.gouv.fr/api/api-entreprise.html).
L’API Entreprise est une plateforme d’échange opérée par la DINSIC (Direction Interministérielle du Numérique et du Système d’Information et de Communication) qui met à disposition des opérateurs publics et des administrations, des données et des documents administratifs de référence, relatifs aux entreprises et association, qui sont délivrés par les administrations et les organismes publics, afin de simplifier les démarches administratives et la gestion des dossiers.
L’accès à l’API Entreprise est modéré et régulé par la DINSIC, qui attribue à chaque client des autorisations de récupération d’informations selon la nature des démarches à traiter (Marchés publics simplifiés, aides publiques simplifiés…)
Les organismes partenaires de l’API Entreprise sont les suivants, permettant ainsi de balayer efficacement le large spectre des attestations fiscales et sociales nécessaires : DGFiP, ACOSS, CNETP, INSEE, INFOGREFFE, FNTP, MSA, OPQIBI, PRO BTP, QUALIBAT, Ministère intérieur, INPI, AGEFIPH, Banque de France.
Outre l’allègement et la simplification des procédures ainsi opéré pour les entreprises, les acheteurs publics y trouveront leur compte également : pouvoir disposer directement, et sans risque d’erreur, des attestations les plus récentes et donc plus fiables que certaines communications.
[1] L’article 31 du décret n°2016-360 définit le profil d’acheteur : « la plateforme de dématérialisation permettant notamment aux acheteurs de mettre les documents de la consultation à disposition des opérateurs économiques par voie électronique et de réceptionner par voie électronique les documents transmis par les candidats et les soumissionnaires. »
[2] API ENTREPRISE est un service développé par l’État permettant de raccorder les administrations détentrices de données aux services en ligne de l’administration. Pour plus d’informations sur l’API Entreprise : https://api.gouv.fr/api/api-entreprise.html
Nicolas CHARREL, avocat au barreau de Paris, avocat européen à la Cour du Luxembourg - Médiateur conciliateur
Camille RENARD, avocate au barreau de Marseille
Cabinet CHARREL & Associés, Paris, Marseille, Montpellier.
Pour toute question complémentaire ou précisions sur la mise en oeuvre de cette simplification, vous pouvez contacter les spécialistes du Cabinet CHARREL & Associés à l'adresse suivante : contact@charrel-avocats.com