Du fait du principe de la liberté de la concurrence, les prix et leurs critères de notation ne sont pas normés mais régulièrement encadrés par le juge. Il s’agit pour le pouvoir adjudicateur, notamment en vertu de l’article L2152-7 du code de la commande publique, de déterminer l’offre économiquement la plus avantageuse. La méthode de notation notamment du critère prix doit pour cela être neutre et non discriminatoire.
Le juge administratif contrôle de manière récurrente cette dernière afin d’assurer « le respect des principes de liberté d’accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures ».
Le tribunal administratif de Rennes a récemment été amené à juger de la méthode de notation appliquée dans le cadre de la passation d'un marché d'entretien de locaux et s'est trouvé face à la question est de savoir si, en présence de soumissionnaires à un marché public assujettis à des taux de TVA différents, certains en étant même exemptés, le taux de TVA doit être pris en compte dans l’appréciation du critère prix afin de comparer la charge financière qui pèse sur le pouvoir adjudicateur, tout en garantissant la transparence et la non-discrimination lors de la passation du marché.
Dans son arrêt en date du 15 novembre 2016, la Cour Administrative de Bordeaux avait retenu que « La régularité d’une méthode de notation de prix de prestations s’apprécie sans considération de la situation particulière de chacune des entreprises candidates et ne saurait donc dépendre, notamment, de leur situation fiscale respective au regard de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA)».
Le Tribunal de Rennes dans son ordonnance n°2202133 en date du 13 mai 2022 se base sur ce principe et vient compléter la jurisprudence existante en reconnaissant la validité de la notation du critère prix lorsque le pouvoir adjudicateur applique pour comparer les offres des candidats soumis à un taux de TVA différents, un taux de TVA uniforme pour chacun d’eux.
En effet, si le juge rappelle qu’ « eu égard à ce principe (cf infra), une collectivité ne saurait comparer les prix proposés par chacune des entreprises en ajoutant aux prix proposés hors taxe, conformément aux règles définies par elle, par les candidats non exonérés de taxe à la date de la comparaison, la TVA qui sera éventuellement due par la collectivité sur les prestations », il retient que, dans le cas d’espèce, l’uniformité du taux utilisé pour calculer le prix TTC a quand même permis de comparer valablement les offres émises, de sorte que la procédure de passation du marché n’a pas été entachée d’irrégularité sur ce point.
Ainsi, même si le juge reconnait qu’il ne s’agit pas de la méthode la plus appropriée, le fait d’augmenter les prix pour les comparer d’une TVA fictive identique à chacun des candidats ne rompt pas le principe d’égalité dans le cadre de l’analyse de leur offre.
Cette réponse nous paraît néanmoins peu satisfaisante pour les opérateurs économiques qui ne sont pas soumis à la TVA (de sorte que leur appliquer une TVA fictive les désavantage) comme pour les acheteurs qui peuvent, selon les cas, récupérer la TVA grevant une opération ou non (de sorte qu'en cas de non-récupération, c'est bien le coût TTC qui financièrement est supporté par le budget).
Peut-être faut-il concevoir qu'en la matière, s'il est difficile de se faire une religion, c'est probablement qu'il n'y en a pas compte tenu des situations assez différentes pouvant exister.