Début de semaine difficile avec une gueule de pierre face à l’ampleur du sinistre subi par une belle Dame. Autour d’un verre à refaire l’avenir, un murmure sourd commençait à monter et des messages d'ailleurs, d'ailleurs, éclairaient aussi nos téléphones. Paris brûle -t-il ? Non, Notre Dame !
Une si belle Dame à qui le monde entier déclare sa flamme laïque, un comble – détruit – pour un édifice dépassé dans la propre religiosité. Et comme souvent, derrière cette pirouette de pudeur que peut être un jeu de mot, se cache des émotions profondes : celles de ne pas l’avoir assez aimée, de ne pas lui avoir assez dit, de ne pas l’avoir présentée plus tôt à ses enfants qui peuvent passer devant elle tous les jours, sans savoir ses amours restreintes, faute de temps consacré...
Le jeu suicidaire d’une étincelle « raisonne » comme un appel au peuple qui semblait lui dire qu’il ne l’aimait plus, plus comme avant.
La flamme est un oxymore entier, comme un nombre, porteuse de destruction et d’espoir puisqu’après avoir brulé la forêt, il faut la reconstruire, prendre le temps pour cette administration de la chose, mais vite. Concept du « en même temps » cher à notre Président au cœur du débat des anciens et des modernes, ceux prônant la reconstruction à l’identique sans chêne assez vieux et sans entrave de la temporalité de Journaux Officiels, ceux voulant ne pas se hâter rapidement avec la temporalité de Jeux Olympiques pour démontrer, sur le terrain du jeu de construction, notre capacité à nous dépasser en expérimentant de nouvelles techniques.
N’est-ce d’ailleurs pas pour dépasser les contraintes que le génie civil de Filippo Brunelleschi, mis à disposition du religieux, a réinventé des techniques de construction pour garantir l’insoutenable légèreté des 37.000 tonnes du Duomo de Florence ?
De nombreux doutes s’expriment quant à l’insuffisance du nombre d’artisans mobilisables, aux techniques pouvant être utilisées, aux contraintes d’accès et de délais, aux procédures qui en soi sont également chronophages.
Tester immédiatement le permis d'innover
Mais n’a t-on pas l’opportunité de tester immédiatement l’efficacité des permis d’expérimenter, de déroger, d’innover, en vigueur depuis un mois ? (voir notre article sur les conditions de mise en œuvre du nouveau « permis d’expérimenter » avec la parution du décret du 11 mars 2019 https://charrel-avocats.com/permis-de-deroger-pour-experimenter-novation-pour-linnovation-dans-la-construction/).
Pour une telle cause nationale de reconstruction, le défi à relever devra aussi être juridique, systémique pour ce séisme, mais comme il doit l’être aussi pour la lutte contre les copropriétés dégradées qui elles, ont meurtri plus que notre mémoire : il est nécessaire de revisiter et d’innover, et ne pas hésiter à déroger au JO, pour adapter le Code du Patrimoine, de l’Urbanisme, de la Construction, de la Commande publique, des Collectivités Territoriales, libérer autant de carcans défendus par tant de parties prenantes, pour se libérer de la technique de la chaînette du Duomo, de la forêt perdue de Notre Dame, du BFUP peut-être, pour explorer pourquoi pas des techniques spatiales pour soutenir un des Temples de l’Humanité pour… des siècles et siècles.
Et voir notre passé dépassé.
Nicolas CHARREL, avocat aux barreaux de Paris et de Luxembourg - Médiateur près des juridictions administratives - Charrel & Associés, Paris - Montpellier - Montpellier