La chambre criminelle de la Cour de cassation, dans un arrêt du 18 octobre dernier, a eu à juger des critères de caractérisation du délit d'atteinte à la conservation d'habitats naturels issu de l’article le 1° de l'article L. 415-3 du code de l'environnement.
Cet article punit « de trois ans d’emprisonnement er de 150 000 € d’amende 1° Le fait, en violation des interdictions ou des prescriptions prévues par les dispositions de l'article L.411-1 et par les règlements ou les décisions individuelles pris en application de l'article L.411-2 :
a) De porter atteinte à la conservation d'espèces animales non domestiques, à l'exception des perturbations intentionnelles ;
b) De porter atteinte à la conservation d'espèces végétales non cultivées ;
c) De porter atteinte à la conservation d'habitats naturels ;
d) De détruire, altérer ou dégrader des sites d'intérêt géologique, notamment les cavités souterraines naturelles ou artificielles, ainsi que de prélever, détruire ou dégrader des fossiles, minéraux et concrétions présents sur ces sites ».
Le litige de l’espèce concerne la construction d’un gazoduc et notamment les travaux attachés tels que le défrichement de zones boisées ou la création d’une piste de travail puis d’accès à l’ouvrage.
Régulièrement autorisés, ces travaux avaient fait l’objet pour un temps déterminé d’un arrêté préfectoral pris au titre de l’article L.411-2 du code de l’environnement permettant de déroger à la protection assurée des « sites d’intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats »[1], « à condition qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante ».
Or, plus de deux ans à l’issu de ce délai, il s’avère que les mesures de compensation à la destruction des habitats naturels sur le lieu des travaux du gazoduc n’ont pas été prises, le site n’ayant pas été reboisé par la société.
Cités à comparaitre devant le tribunal correctionnel, celle-ci ainsi que le directeur de projet ont été condamnés pour infraction aux dispositions précitées du code de l’environnement à une amende et à la remise en état du lieu sous astreinte.
L’affaire est alors portée devant la Cour de cassation, qui après avoir relevé que la société s’était expressément engagée à replanter des arbres, cela corroboré par le fait « que le terme employé dans le dossier établi pour obtenir les dérogations est celui de « plantation » et non celui de « régénération naturelle des végétaux » » et que les échanges sur une éventuelle régénération ne se substituaient pas à l’obligation de remise en état mise à la charge de la société et ne constituait en l’occurrence pas non plus un début d’exécution des mesures compensatoires, juge :
- Que « le délit (…) d'atteinte à la conservation des habitats naturels ou espèces animales non domestiques (…) peut être consommé par la simple abstention de satisfaire » aux prescriptions de l’arrêté dérogatoire.
- « une faute d'imprudence ou négligence suffit à caractériser l'élément moral » de ce délit.
Elle confirme donc les condamnations énoncées à l’encontre de la société et du directeur de projet.
Ainsi, le délit d’atteinte à la protection des habitats naturels ne constitue donc pas une infraction de commission et peut résulter d’une simple abstention, qui ne nécessite pas l’intention de son auteur.
[1] Article L.411-1 du code de l’environnement