L’article L 103-2 du code de l’urbanisme prévoit que doivent faire l’objet d’une concertation préalable l’élaboration et la modification de certains document d’urbanisme ainsi que certains des projets, dont notamment les projets de renouvellement urbain.
Malheureusement, ni le code de l’urbanisme ni la doctrine ni la jurisprudence ne se sont accordés sur ce que recouvre la notion de projet renouvellement urbain au sens de cet article.
Pour certaines cours administratives d’appel[1], cette notion s’apprécie in abstracto : elle renvoie seulement aux projets de renouvellement urbain prévu par la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, (dite "Loi Borloo") c’est-à-dire les actions de renouvellement urbain prévue par l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (NPNRU, PNRU, PNRQAD, programmes d’investissement avenir, etc.).
Pour le tribunal administratif de Montpellier, cette notion doit, en revanche, être appréciée in concerto : elle concerne toute opération d’aménagement d’une certaine ampleur, appréciée selon la portée des aménagements prévus et le coût de l’opération, qu’elle soit d’initiative publique ou privée[2].
Cette position est celle retenue par une partie de la doctrine qui estime que la notion de renouvellement urbain n’est pas limitée aux opérations de renouvellement urbain prévues par la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 précitée mais vise :
- Tout projet d’aménagement d’une certaine ampleur ayant pour objet la reconstruction de la ville sur elle-même et de recyclage de ses ressources bâties et foncières[3] ;
- Tout projet complexe d’actions, de constructions, de destructions et de restructurations d’une importance suffisante pour justifier que l’on y associe la population et qui nécessite une intervention publique impliquant des interventions foncières et/ou la réalisation d’équipement publics[4].
Dans une décision du 31 janvier 2022, n° 437451 concernant une opération sur la Commune de Montpellier menée par la SCI Boulevard Ernert Renan MTP, le Conseil d’Etat paraît trancher en faveur de la position du tribunal administratif de Montpellier en estimant que l’appartenance d’un projet à la catégorie des projets de renouvellement urbain peut être appréciée eu égard à l’importance de l’opération.
Cette décision paraît également valider le fait qu’un projet d’initiative privée peut être un projet de renouvellement urbain, le jugement du tribunal administratif de Montpellier portant sur une opération d’aménagement d’un établissement privé d'enseignement et de 43 logements collectifs.
Ce faisant, l’approche retenue par le jugement précité et validé la Conseil d’Etat peut être rapprochée de celle retenue pour la notion d’opération d’aménagement au sens de l’article L 311-1 du code de l’urbanisme dans la jurisprudence Commune de Chamonix[5] qui, pour le juge administratif, doit être appréciée in concreto au regard des caractéristiques de l’opération de l’importance des travaux qu’elle implique.
Toutefois, dans sa décision, le Conseil d’Etat valide seulement la méthode d’appréciation du tribunal administratif de Montpellier sans pour autant préciser selon quel(s) critère(s) une opération de renouvellement urbain doit être appréciée.
A la suite de cette décision, les juridictions de fond fourniront certainement une grille de lecture pour savoir si un projet rentre ou non dans la catégorie des projets de renouvellement urbain mais, dans cette attente, les porteurs de projets, qu’il soit publics ou privés, devront redoubler de prudence en se référant aux définitions fournies par la doctrine afin de trancher sur la nature de leur projet et ainsi anticiper la nécessité de réaliser une éventuelle concertation préalable au titre du code de l’urbanisme.
[1] Voir notamment : CAA de Lyon, 23 avril 2019, n°18LY01916 et CAA de Paris, 10 juillet 2018, n°17PA00190
[2] TA de Montpellier, 7 novembre 2019, n°1900416
[3] LexisNexis, Construction - Urbanisme n° 4, Avril 2020, Concertation et projets de renouvellement urbain, Laetitia Santoni
[4] Rapport Gridauh, septembre 2017, La réforme de la concertation opérée par l’ordonnance du 16 août 2016 et ses incidences sur les procédures d’urbanisme, Norbert Foulquier, Yves Jégouzo et Marie Soazic
[5] Conseil d'Etat, 28 juillet 1993, Commune de Chamonix, n° 124099