Une procédure unique de passation peut conduire à la conclusion de plusieurs contrats de concession si la volonté de l’autorité concédante a été d’attribuer une seule concession « multi-services ».
Dans le cadre du renouvellement de la délégation de service public de l’eau potable et de l’assainissement, une commune avait fait le choix de lancer une procédure de passation unique en vue de la signature de trois contrats de concession distincts, chaque contrat étant dédié à un service public, l’assainissement non collectif ayant été intégré au périmètre de la procédure.
Le délégataire sortant, soumissionnaire évincé, reprochait à la commune d’avoir manqué à ses obligations de publicité et de mise en concurrence en s’abstenant de porter à la connaissance des candidats les critères de sélection des offres permettant de désigner le soumissionnaire ayant remis la meilleure offre au regard de son avantage économique global pour l’autorité concédante, tous contrats confondus.
Selon le requérant, cela conférait à la commune une liberté de choix illimitée pour l’attribution des trois contrats à un délégataire unique.
Le débat portait donc sur la possibilité de regarder ces trois contrats, il est vrai formellement distincts, comme constituant en réalité un même ensemble contractuel « multi-services » - ce que permet l’absence d’obligation d’allotir en droit des concessions - attribué sur la base d’une grille de critères clairement indiquée aux candidats dans le cadre des documents de la consultation et liée à l’objet du contrat unique.
C’est précisément la conclusion à laquelle parvient le juge des référés en retenant que la volonté de l’autorité concédante lors du lancement de la procédure avait été d’attribuer une seule délégation de service public.
Pour ce faire, il relève de manière pragmatique que si les documents de la consultation exigeaient la remise d’un mémoire méthodologique ou encore d’un compte d’exploitation prévisionnel par service, cette présentation particulière des offres aboutissait au même résultat que si l’autorité concédante avait sollicité la remise d’un seul mémoire méthodologique divisé en trois chapitres, chaque chapitre étant dédié à un service ou encore d’un seul compte d’exploitation prévisionnel, divisé en trois onglets.
C’est en effet le propre des concessions « multi-services » que de solliciter des soumissionnaires des éléments spécifiques à chaque service qui, sans être dépourvu de lien avec les autres services inclus dans le périmètre du contrat, répondent à des exigences techniques et à des logiques économiques différentes.
En aucun cas, cela ne signifiait donc que les candidats étaient invités à présenter une offre par service donc trois offres distinctes. Il faut dire que, dans cette affaire, l’analyse des offres avait bien été conduite critère par critère et non service par service.
Si cette pratique n’est pas la plus répandue, les autorités concédantes privilégiant traditionnellement la signature d’un seul et même contrat, elle présente au moins le mérite de la clarté et celui de faciliter le suivi des engagements du délégataire, service par service.
TA TOULON, ord. du 7 janvier 2022, Suez Eau France, req. n° 2103266