A la croisée du droit de l’économie mixte locale et celui de la commande publique, le juge administratif de Marseille confirme la décision d'éviction d'une SEML candidate à un marché public faute de lien entre l'objet du marché et son objet social.
Une SEML a répondu à l'appel d'offres lancé par une Métropole pour l'attribution d'un marché portant sur l'exploitation de parkings. Sa candidature a cependant été rejetée pour défaut de capacité juridique.
Cette SEML a donc saisi la juridiction administrative d'un référé précontractuel, en sollicitant l'annulation de la décision de rejet de sa candidature par la Métropole et la reprise de la procédure d'attribution au stade de l'examen des offres en intégrant la sienne.
Par une ordonnance du 27 février 2020, le juge des référés précontractuels du tribunal administratif de Marseille précise tout d’abord qu’à la suite d’un transfert de compétence, une SEML ne peut conserver, dans son objet social, une mission qui ne correspond plus, du fait de ce transfert, à la compétence d’aucun de ses actionnaires.
Dans cette hypothèse, elle n’a d’autres choix que de réduire son objet social (pour supprimer la mission correspondant à la compétence transférée) ou d’élargir son actionnariat à la collectivité territoriale ou au groupement de collectivités territoriales désormais compétent.
Autrement dit, si l’on sait désormais qu’une collectivité territoriale ou un groupement peut être actionnaire d’une SEML sans disposer de toutes les compétences relatives à toutes les missions de cette société, encore faut-il que chacune de ses missions se rattache à une compétence de l’un des actionnaires de la SEML.
Les EPL n’ont jamais pu et ne peuvent toujours pas exercer une mission « orpheline » c’est-à-dire dénuée de lien avec les compétences de son actionnariat.
Ensuite, l’ordonnance tire les conséquences de cette règle au cas d’une SEML qui, ne la respectant pas, s’était pourtant portée candidate à l’attribution d’un marché public et avait vu sa candidature écartée faute de lien entre son actionnariat et la composante de son objet social correspondant à l’objet du marché.
Était en cause une procédure d’appel d’offres relative à un marché d’exploitation d’ouvrages de stationnement à l’attribution duquel une SEML avait candidaté. Or, si l’objet social de cette société comportait bien la gestion de tels ouvrages, aucun de ses actionnaires ne disposait de la compétence en la matière puisque cette compétence avait été transférée par la commune, actionnaire, à une métropole qui n’était pas entrée au capital.
Le juge des référés précontractuels retient alors qu’ « il résulte (…) de l’article L. 1521-1 du code général des collectivités territoriales qu’une société d’économie mixte locale ne peut pas exercer une mission qui ne correspond pas à une compétence de la collectivité actionnaire ».
Dès lors, l’acheteur « devait » écarter sa candidature dans la mesure où celle-ci contrevient à une interdiction légale au même titre que celle empêchant une SPL de candidater à l’attribution d’une concession passée par une collectivité non-actionnaire (TA CLERMONT-FERRAND, 29 mars 2016, SPL SEMERAP, req. n°1600426) ou encore que celle faite à un contrôleur technique de candidater à l’attribution d’un marché comportant des prestations de conception (CE, 18 juin 2010, Ministre d’Etat, Garde des sceaux, req. n°336418) .
Cette une solution témoigne de la volonté de ne pas permettre aux EPL de faire ce que ne peuvent pas faire leurs actionnaires et de nature à renforcer le contrôle devant être exercé par les acheteurs au moment de l’examen des candidatures lorsqu’elles sont présentées par une EPL.
TA MARSEILLE, Ord., 27 février 2020, SEMOVIM, req. n°2000880.