La Direction des Affaires Juridiques du Ministère de l’Economie, des Finances et de la Relance (« DAJ ») a publié une nouvelle fiche technique relative aux certificats d’économie d’énergie (« CEE ») et à la commande publique (voir fichier à télécharger ci-dessous).
Cette fiche technique actualise, étoffe et modifie (à la marge) la précédente analyse figurant aux termes d’une « question-réponse » datant de la fin de l’année 2013.
Qu'est-ce qu'un "CEE" ?
La DAJ précise ce qu’est un « CEE » (à savoir un bien meuble immatériel), reprend la liste des obligés (à savoir les fournisseurs d’énergies) ainsi que des acteurs (principalement des personnes publiques ou parapubliques) et prestations éligibles. Elle indique également les modalités permettant aux obligés de répondre à leurs obligations. Le bureau du conseil aux acheteurs a même poussé l’explication en précisant comment les CEE pouvaient être délivrés aux obligés et aux éligibles.
Ces rappels qui n’intéressent pas directement la commande publique apparaissent néanmoins indispensables pour permettre au lecteur de saisir les contraintes liées au recours aux CEE dans le cadre de la commande publique. L’on ne peut alors que saluer l’effort pédagogique.
Interaction entre le dispositif des CEE et la commande publique
Il fait distinguer trois cas et un point de vigilance.
Cas 1 : « l’obtention des CEE par un acheteur éligible dans le cadre d’un marché de travaux »
La rédaction reprend sur ce point celle de l’ancienne « question-réponse » et ajoute une « bonne pratique » en préconisant aux acheteurs de préciser dans les documents de la consultation que les soumissionnaires de devront pas intégrer les CEE dans leurs offres de prix.
Cas 2 : « valorisation des CEE par les candidats dans le cadre d’une procédure de passation d’un marché de travaux lancée par un acheteur éligible ».
Il correspond à la troisième situation évoquée dans l’ancienne « question-réponse ».
Ainsi que nous le soulignions dans notre article consacré à la commande publique et aux CEE, paru sur le site achatpublic.info, l’acheteur ne peut imposer le recours aux CEE dans le cadre de la passation ou de l’exécution du marché.
Outre le rappel de ses anciennes préconisations, réactualisées au regard de l’évolution du droit de la commande publique, la DAJ propose aux acheteurs « afin de pouvoir comparer, de manière objective, les éléments financiers des offres avec ou sans CEE et déterminer celle qui est économiquement la plus avantageuse, (…) les documents de la consultation devraient attirer l’attention des soumissionnaires ayant valorisé des CEE dans leurs offres sur la nécessité d’indiquer le prix net qui serait payé par l’acheteur si les certificats n’étaient pas obtenus ainsi que, le cas échéant, le mode alternatif de rémunération ».
Cette formulation laisse néanmoins planer certaines interrogations.
Dès lors qu’il s’agirait simplement pour les acheteurs « d’attirer l’attention des soumissionnaires », l’on peut se demander si la DAJ préconise aux acheteurs d’imposer une telle mention aux soumissionnaires ou seulement de leur suggérer. La différence est de taille puisque dans le premier cas, l’offre sera considérée comme irrégulière alors que dans le second cas l’acheteur devra analyser l’offre.
Par ailleurs, en laissant le soin aux opérateurs économiques d’apporter ces précisions, la DAJ ne règle pas la question des éventuelles erreurs commises par les soumissionnaires en ce qui concerne le nombre et/ou la valeur des CEE susceptibles d’être tirés de l’exécution d’une opération. En effet, s’agit-il d’un cas dans lequel l’offre pourra être régularisée sans que cela ne constitue une modification substantielle ?
Enfin, et d’une manière générale, il est possible de s’interroger sur les mentions de la fiche technique indiquant à plusieurs reprises qu’il conviendrait de prévoir l’hypothèse dans laquelle les CEE ne seraient pas délivrés à l’issue du marché. A suivre la DAJ, le risque de non-obtention des CEE devrait être porté par l’acheteur puisque dans une telle hypothèse, c’est à lui qu’il appartiendrait de régler le coût des travaux (sans valorisation des CEE).
Néanmoins, le fait qu’une opération de travaux n’obtienne pas le nombre de CEE escomptés peut être la conséquence de faits imputables à l’entreprise cocontractante. Or, dans une telle hypothèse, si l’acheteur règle le coût total des travaux, cela revient en réalité à modifier le montant du prix du marché car il paiera non seulement, le coût des prestations mais également, subira une perte tirée de l’impossibilité de valoriser directement des CEE (conformément au premier cas). Aussi, il nous semble que les acheteurs devront faire preuve de vigilance dans le cadre de la rédaction des clauses envisagées par la DAJ afin d’éviter un tel écueil.
Cas 3 : « cession du droit de demander la délivrance des CEE à un obligé »
La DAJ précise qu' "il s’agit de la seule possibilité offerte aux acheteurs non éligibles, donc à tous les acheteurs.
Préalablement à la réalisation des travaux et dans le respect des règles de la commande publique qui lui sont applicables, l’acheteur peut conclure un partenariat avec un obligé afin d’obtenir une participation financière à ces travaux d’efficacité énergétique, en échange de la cession du droit à réclamer les CEE qui seront obtenus à l’issue des travaux.
Le partenariat entre l’obligé et l’acheteur ne relève pas des règles de la commande publique si les conditions suivantes sont réunies :
-
la convention prévoit l’équivalence financière entre participation financière et CEE cédés ;
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la participation financière n’intervient pas avant la fin des travaux, mais est versée sur justification de la réalisation des travaux et après transmission des éléments constitutifs du dossier de demande de délivrance de CEE ;
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la convention ne prévoit aucune prestation de service du partenaire au bénéfice de l’acheteur.
Dans le cas où le partenariat ne relève pas des règles de la commande publique (si toutes des conditions ci-dessus sont réunies), l’acheteur peut toutefois organiser, s’il le souhaite, une consultation publique afin de bénéficier de la meilleure offre possible".
Point de vigilance
La DAJ attire l’attention des acheteurs sur un point de vigilance (quatrième situation de l’ancienne « question-réponse ») pour rappeler que les travaux réalisés sans frais pour les acheteurs constituent en réalité des prestations fournies à titre onéreux et correspondant à un besoin de ces derniers. Aussi, le bureau du conseil aux acheteurs rappelle que ces contrats constituent des contrats de la commande publique notamment soumis, sauf exceptions, aux obligations de publicité et de mise en concurrence préalable.
Enfin, aux termes de sa fiche technique, la DAJ apporte des précisions sur la prise en compte de la composante « CEE » dans les marchés d’achat d’électricité et de gaz relevant de la commande publique.
A relire : notre tribune dans achatpublic.info