Dans une réponse apportée le 5 mai 2022, au Sénateur Yves Détraigne, le ministère de l’Économie, des finances et de la relance répond à la question de la préservation de l’anonymat lors d’un concours de maîtrise d’œuvre.
Le concours de maîtrise d’œuvre est une technique d’achat par laquelle le maître d’ouvrage, après avis d’un jury, choisit un projet parmi les propositions de plusieurs concurrents préalablement sélectionnés, en vue de l’attribution d’un marché de service.
Le déroulement du concours s’effectue en deux étapes :
- La phase de sélection des participants au concours, autrement dit la sélection des candidats admis à concourir
- La phase d’élaboration des projets par les participants admis à concourir
En ce sens, l’article R. 2162-18 du Code de la commande publique dispose qu’« Après avoir analysé́ les candidatures et formulé un avis motivé sur celles-ci, le jury examine les plans et projets présentés de manière anonyme par les opérateurs économiques admis à participer au concours, sur la base des critères d’évaluation définis dans l’avis de concours ».
Ce qui suppose qu’en premier lieu, lors de l’examen des candidatures, le jury prend connaissance de l’identité des candidats – afin de vérifier notamment que l’opérateur économique n’entre pas dans un cas d’interdiction d’accès à la commande publique, mais également pour analyser ses capacités économiques et professionnelles, in fine, s’assurer que le potentiel futur contractant soit suffisamment apte à exécuter les prestations faisant l’objet du marché.
Une fois les candidatures admises, les opérateurs économiques présentent de manière anonyme, leurs plans et projets afin de satisfaire aux critères d’évaluation des projets définis dans l’avis de concours.
Le fait que le jury ait connaissance de l’identité des entreprises candidates lors de la phase de sélection des candidatures peut-il avoir des conséquences, et ce, notamment en matière d’égalité de traitement des candidats, au moment de l’examen des plans et des projets anonymisés ?
Dans sa réponse, le Ministère de l’Économie, rappelle les dispositions de l’article R. 2162-18 du code de la commande publique aux termes desquelles l’anonymat n’est imposé que pour les seuls plans et projets remis par les opérateurs admis à concourir, cela étant confirmé par l'article 82 de la directive marchés publics 2014/24/UE du 26 février 2014 "qui ne prévoit l'intervention du jury de manière anonyme que lors de la phase d'examen des projets" à moins que l’acheteur ait étendu au sein du règlement de la consultation l’anonymat à la phase de candidature.
Également, le ministère s’attache à rappeler que dans tous les cas, de nombreuses garanties sont apportées pour que l’anonymat soit préservé lors de l’examen des projets, notamment en s’appuyant sur des principes jurisprudentiels.
En ce sens, (CAA Marseille, 24 septembre 2018, n° 17MA01101), l'acheteur doit anonymiser le contenu des plis qu'il a ouverts avant transmission au jury et un secrétariat de concours peut être constitué afin « de recevoir les prestations et de mettre en œuvre la procédure permettant d'assurer le respect de l'anonymat en recensant les pièces constitutives du dossier remis par chaque candidat et en lui affectant un code permettant de transmettre au jury les projets anonymes » (Rép. min. n° 19305, JO Sénat, 12 janvier 2006, p. 85).
Ainsi, la présentation des plans et projets des opérateurs économiques doit respecter l'anonymat vis-à-vis des membres du jury, dans les conditions posées par le règlement du concours, sous peine d'irrégularité (CE, 14 février 1994, n° 80646 ; CAA Marseille, 21 octobre 2011, n° 08MA04843 ; CAA Marseille, 23 avril 2013, n° 10MA01670)
Enfin, le ministère rappelle que l’anonymat ne pourra être levé qu'une fois que l’avis motivé du jury, portant sur le classement des projets et ses observations, sera rendu.
Il ressort de cette réponse ministérielle que la connaissance par le jury de l’identité des opérateurs économiques en phase candidature n’est pas de nature à compromettre l’anonymat des soumissionnaires lors de la phase de présentation des projets, et par voie de conséquence, ne remet pas en cause le principe fondamental du respect de l’égalité de traitement des candidats par l’acheteur.