En application de l’article 29 de la loi du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (dite "loi APER"), la contribution due par les collectivités en charge de l’urbanisme (CCU) pour la part de l’extension des réseaux d’énergie située hors terrain d’assiette de l’opération a été supprimée.
Par ailleurs, l’ordonnance du 23 août 2023 a introduit un nouvel article L. 342-21 dans le Code de l’énergie aux termes duquel l’intégralité de la contribution due au titre de l’extension du réseau électrique est payée par le demandeur du permis :
Le demandeur d'un raccordement aux réseaux publics de distribution d'électricité est le redevable de la contribution.
La contribution prévue à l'article L. 342-12 pour le raccordement des consommateurs au réseau de distribution, lorsque ce raccordement comprend une extension du réseau, est versée, dans des conditions, notamment de délais, fixées par les cahiers des charges des concessions ou les règlements de service des régies ou, à défaut, par décret en Conseil d'Etat :
"1° Lorsque l'extension est rendue nécessaire par une opération ayant fait l'objet d'un permis de construire, d'un permis d'aménager ou d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable, située en dehors d'une zone d'aménagement concerté et ne donnant pas lieu à la participation spécifique pour la réalisation d'équipements publics exceptionnels ou à la participation pour voirie et réseaux mentionnées à l'article L. 332-6-1 du code de l'urbanisme, la contribution est versée par le bénéficiaire du permis ou de la décision de non-opposition.
Les coûts de remplacement ou d'adaptation d'ouvrages existants ou de création de canalisations en parallèle à des canalisations existantes afin d'en éviter le remplacement, rendus nécessaires par le raccordement en basse tension des consommateurs finals, sont couverts par le tarif d'utilisation des réseaux publics de distribution mentionné à l'article L. 341-2, lorsque ce raccordement est effectué par le gestionnaire du réseau de distribution ;
2° Lorsque l'extension est rendue nécessaire par une opération donnant lieu à la participation spécifique pour la réalisation d'équipements publics exceptionnels mentionnée à l'article L. 332-6-1 du code de l'urbanisme, la contribution est versée par le bénéficiaire de l'autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol ;
3° Lorsque l'extension est rendue nécessaire par l'aménagement d'une zone d'aménagement concerté, la contribution correspondant aux équipements nécessaires à la zone est versée par l'aménageur ;
4° Lorsque le propriétaire acquitte la participation pour voirie et réseaux en application de la dernière phrase du troisième alinéa de l'article L. 332-11-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014, directement à l'établissement public de coopération intercommunale ou au syndicat mixte compétent, ou lorsque le conseil municipal a convenu d'affecter au financement de ces travaux d'autres ressources avec l'accord de cet établissement public de coopération intercommunale ou de ce syndicat mixte, celui-ci est débiteur de la contribution relative à l'extension ;
5° Lorsque l'extension de ces réseaux est destinée au raccordement d'un consommateur d'électricité en dehors d'une opération de construction ou d'aménagement autorisée en application du code de l'urbanisme, la contribution correspondant à cette extension est versée par le demandeur du raccordement".
En d’autres termes, l’intégralité de la contribution due au titre de l’extension du réseau électrique sera désormais payée par le demandeur du permis.
En conséquence, les coûts des extensions seront financés en partie par le TURPE (tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité) selon le taux de réfaction qui demeure inchangé et le reste par le demandeur. Les collectivités territoriales n’auront donc plus à financer cette extension du réseau.
Cette nouvelle règle entrée en vigueur le 10 novembre dernier (article 7 de l’ordonnance du 23 août 2023) est toutefois en contradiction avec l’article L. 332-15 du Code de l’urbanisme qui lui demeure inchangé.
En effet, l’article L. 332-15 du Code de l’urbanisme limite la contribution du demandeur du raccordement « à la fraction de l’extension du réseau située sur le terrain d’assiette de l’opération » ou « sous réserve que ce raccordement n'excède pas cent mètres et que les réseaux correspondants, dimensionnés pour correspondre exclusivement aux besoins du projet, ne soient pas destinés à desservir d'autres constructions existantes ou futures ».
L’absence de modification de ce dernier article pose des difficultés juridiques puisque dans un cas l’intégralité de la contribution est à la charge du demandeur quand dans l’autre, il lui est seulement possible de prendre en charge une part de cette contribution.
En cas de contradiction entre deux textes de loi, on favorise l’application de la loi nouvelle plus favorable.Toutefois, pour qu’une ordonnance ait force de loi il est nécessaire qu’elle soit ratifiée, ou qu’un projet de loi de ratification a été déposé dans le délai d’habilitation initialement fixé et que celui-ci est échu[1]. Sans une telle action, l’ordonnance conserve un caractère réglementaire.
Un projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2023-816 du 23 août 2023 relative au raccordement et à l'accès aux réseaux publics d'électricité, n° 1843 rectifié , a été déposé le mercredi 8 novembre 2023.
En conséquence, désormais, en matière de réseau d’électricité, l’application de l’article L. 342-21 du Code de l’énergie doit donc prévaloir quant à celle de l’article L.332-15 du Code de l’urbanisme.
D’ailleurs, par une réponse publiée dans le JO Sénat du 04/01/2024, le Ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires affirme :
"Les articles 26 et 29 de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables modifient la prise en charge de la part de contribution correspondant à l'extension du réseau électrique située en dehors du terrain d'assiette de l'opération. Depuis le 10 septembre 2023, il revient au bénéficiaire d'une autorisation d'urbanisme de s'acquitter désormais de la contribution prévue dans le code de l'énergie pour tous les travaux d'extension rendus nécessaires par un raccordement. Toutefois, les dispositions de l'article L.332-15 du code de l'urbanisme notamment son alinéa 3 n'ont pu être modifiées par l'ordonnance et ne sont plus en cohérence avec les dispositions du code de l'énergie, l'article d'habilitation ne permettant que des modifications visant le code de l'énergie. En attendant une modification législative du code de l'urbanisme dont l'élaboration est en cours, le critère des 100 mètres prévu à l'alinéa 4 de l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme n'est plus à prendre en compte, dans le cadre de l'instruction d'une autorisation d'urbanisme, pour déterminer la personne qui doit assurer le financement de l'extension du réseau électrique en dehors du terrain d'assiette du projet. Cette suppression ne concerne en revanche que les raccordements électriques, et pas les réseaux d'eau. S'agissant de la situation de la commune de Montussan, le devis étant antérieur à la date du 10 septembre, la commune aurait en effet dû s'acquitter de l'opération en cas de délivrance du permis."
Dans l’attente de l’harmonisation prochaine du Code de l’urbanisme, les services instructeurs devront donc opérer une distinction entre le financement de l’extension du réseau électrique de celle des autres réseaux.
[1] Conseil constitutionnel, 28 mai 2020, n° 2020-843 QPC