Une rédaction maladroite du décret du 22 juillet 2020 (et d'autres textes avant) a pu conduire certains acheteurs à s'interroger sur la portée des nouvelles dispositions en matière de seuils de dispense et de mise en concurrence. La DAJ explique dans sa dernière communication le régime juridique spécifique de certains territoire.
A la suite de mon commentaire sur le décret portant relèvement de certains seuils de dispense de mise en concurrence et de publicité (notamment le seuil de 70.000 € HT), d'aucuns ont pu penser que ces dispositions avaient en réalité une portée limitée, très limitée, voire exotique (en ce compris l'Antarctique connue pour le nombre important de marchés publics qui y sont conclus).
En effet, l'article 3 dispose que "le présent décret est applicable aux marchés publics conclus par l’Etat et ses établissements publics dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises".
La même formule figure dans l'article 38 de la loi 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne et à l'article 5 de l'ordonnance n°2020-738 du 17 juin 2020 portant diverses mesures en matière de commande publique.
J'avais d'ailleurs déjà eu l'occasion d'expliquer cette spécificité dans les colonnes d'Achatpublic.info concernant la portée des dispositions en faveur des entreprises en difficulté face à la commande publique (ITV du 30 juin 2020 en lien pour les abonnés et en fichier joint pour les autres). En particulier, il était déjà évident que tous les acheteurs soumis au code de la commande publique étaient soumis à ces nouvelles dispositions relatives à l’interdiction de résiliation unilatérale des marchés publics. La dernière phrase de l’article 38 de la loi concernant le champ relève de l’application des dispositions particulières sur les territoires d’outre-mer concernés, bien que les dispositions de l’article L.2195-4 soient déjà applicables conformément aux dispositions des articles L.2651-1 (pour Wallis et Futuna), L.2661-1 (pour la Polynésie française) et L.2681-1 (pour les nombreux marchés conclus dans les terres australes et antarctiques françaises.
Même cause, même effet : la rédaction de l'article 3 du décret du 22 juillet 2020 ne limite évidemment pas les dispositions présentées comme facteur de relance aux seuls acheteurs dans les îles de Wallis et Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises
"Si l’article 3 du décret précise expressément que ce texte est applicable dans les collectivités d’outre-mer soumises au principe de « spécialité législative », en vertu duquel les lois et règlements n'y sont applicables que sur mention expresse du texte en cause, ce relèvement temporaire des seuils concerne bien évidemment tous les acheteurs, qu’ils soient situés en métropole ou dans les collectivités d’outre-mer qui sont soumises au principe d’ « identité législative », et pour lesquels il n’était pas nécessaire de préciser le champ d’application territorial des mesures".
la DAJ de Bercy lève ainsi définitivement l'ambiguïté qui n'aurait pas existé si l'article 3 (et les articles précédents) avait mentionné dès le début qu'il s'applique "aussi" aux territoires concernés. La légistique peut parfois manquer de précision et il n'est pas inutile d'avoir une rédaction plus didactique.
Voir la Communication de la DAJ