Parmi les bonnes résolutions que les acheteurs ne manqueront pas de prendre en ce début d’année 2020 figure celle de bannir de la méthode de notation du critère du prix, la prise en compte d’un taux de rabais proposé par les candidats sur le catalogue fournisseur.
En effet, par deux ordonnances de réveillon rendues le 31 décembre 2019, le juge des référés précontractuels du tribunal administratif de Nîmes a retenu qu’« en ne prenant en compte que le taux de remise pour calculer la note ainsi attribuée au titre de ce sous-critère, sans tenir compte du niveau des prix des articles contenus dans le ou les catalogues des candidats, sur la base desquels était appliqué le rabais proposé, la méthode de notation retenue ne permet pas d’attribuer la meilleure note au candidat ayant proposé le prix le plus bas » et est ainsi irrégulière.
Il est vrai que la notation de la seule proposition de rabais sur catalogue peut avoir un effet pervers consistant pour certains candidats à remettre un catalogue aux tarifs surestimés pour les besoins de la procédure de passation en vue de proposer un taux de remise tout aussi surestimé et d'obtenir la meilleure note au titre de ce sous-critère.
Toutefois, à lire attentivement la solution des ordonnances - qui reprend d’ailleurs le raisonnement d’une ordonnance antérieure rendue par le juge des référés précontractuels du Toulouse (TA Toulouse, ord., 20 mars 2017, req. n°1700895) - il semble que l’appréciation du taux de remise dans la notation du critère du prix n'est pas exclue en tant que telle mais en raison du fait qu’elle ne s’accompagne pas de la prise en compte des prix des articles du catalogue avant rabais.
Or, sur ce dernier point, la solution paraît quelque peu détachée de la réalité des contraintes de l’achat public.
Comparer les prix des catalogues avant rabais supposerait, en effet, que l’acheteur puisse avoir connaissance de tous les catalogues de tous les candidats à l’attribution du marché pour s’assurer que celui remis dans le cadre de la consultation ne comporte pas des prix « gonflés ».
De même, pour effectuer cette comparaison, l’acheteur qui serait tenté de mettre en œuvre une méthode de notation fondée sur l’élaboration d’un DQE masqué en sera rapidement dissuadé. En effet, comment établir cette commande fictive et reconstituer le montant des offres sur la base d’une simulation identique, les catalogues et les articles référencés par ces derniers étant, par définition, différents d'un fournisseur à l'autre ? Plus problématique encore, comment élaborer une commande fictive représentative de l’objet du marché dans la mesure où le recours au catalogue a précisément pour intérêt de permettre à l'acheteur d’y commander ponctuellement des articles qu’il n’a pas fait figurer dans son BPU faute de pouvoir identifier son besoin à leur sujet ?
Pour le dire plus simplement, faute de mode d'emploi permettant de mettre régulièrement en oeuvre une méthode de notation reposant sur la comparaison des niveaux des prix du catalogue avant remise, il sera probablement plus prudent pour l’acheteur d’exclure totalement l’appréciation de la remise sur catalogue de la mise en œuvre du critère du prix.
Il faut toutefois remarquer qu’en pareil cas, les candidats n’étant pas encouragés à consentir un effort sur les prix catalogue, ils pourraient également être tentés de remettre un catalogue aux tarifs surestimés leur permettant de réaliser une marge importante sur les articles commandés hors BPU en cours d'exécution.
Pas certain qu’une telle situation soit plus souhaitable et plus conforme à la logique d’offre économiquement la plus avantageuse que celle sanctionnée par le juge des référés et qui reposait certes sur la prise en compte d'un taux de remise sur catalogue mais en affectant à celui-ci une pondération très relative (5 points sur 50 points affectés au critère du prix).
TA Nîmes, ord., 31 décembre 2019, req. n°1904188 et 1904189