En l’espèce, le maire d’une commune, après avoir constaté une infraction d’urbanisme, a mis en demeure par voie d’arrêté la propriétaire de la parcelle concernée de régulariser les travaux effectués afin de correspondre à la déclaration préalable déposée précédemment pour la construction d'un poulailler et d'une clôture.
Celle-ci avait, en effet, construit un mur plus haut avec portail et panneau solaire non conformes avec la déclaration qui avait fait l’objet d’une non-opposition de la part du maire.
Celui-ci a également assorti sa demande d’une astreinte de 100€ par jour de retard.
L’intéressée a, donc, saisi la juridiction administrative afin de suspendre l’exécution et annuler ledit arrêté, recours accueilli par le juge des référés qui a prononcé la suspension de l’arrêté jusqu’au jugement au fond de sa légalité, aux motifs que la mise en demeure adressée à la requérante lui demandait de démolir la partie du mur en surplus créant ainsi un doute quant à la légalité de l’arrêté attaqué sur le fondement de l’ article L.481-1 du code de l’urbanisme.
Ces dispositions permettent, en effet, depuis leur introduction par l’article 48 de la loi du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique, à l’autorité compétente pour délivrer une autorisation d’urbanisme d’intervenir directement en matière d’infraction d’urbanisme en suivant une procédure déterminée à savoir :
- Inviter l'intéressé à présenter ses observations après avoir dressé un procès-verbal constatant les infractions d’urbanisme commises,
- le mettre en demeure, dans un délai indiqué qui peut être prolongé sans toutefois excéder un an,
- soit de procéder aux travaux nécessaires pour être conforme au permis de construire, de démolir ou d'aménager déposé ou à la décision prise suite à une déclaration préalable de travaux,
- soit de déposer une demande d'autorisation ou une déclaration préalable permettant de les régulariser
- Il peut assortir sa demande d’une astreinte d'un montant maximal de 500 € par jour de retard. Astreinte qui peut également être prononcé après l’expiration du délai prévu dans la mise en demeure sans dépasser la somme totale de 25.000€.
La commune s’est donc pourvue en cassation pour obtenir l’annulation de la suspension.
Après avoir rappelé les dispositions du code de l’urbanisme en matière d’infraction d’urbanisme et les compétences du maire en la matière, le Conseil d’État vient préciser l’interprétation que l’on peut faire de l’ article L.481-1 du code de l’urbanisme et retient que « l'autorité compétente pour délivrer l'autorisation d'urbanisme puisse, dans le cadre de ses pouvoirs de police spéciale et indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées pour réprimer l'infraction constatée, mettre en demeure l'intéressé, après avoir recueilli ses observations, selon la nature de l'irrégularité constatée et les moyens permettant d'y remédier, soit de solliciter l'autorisation ou la déclaration nécessaire, soit de mettre la construction, l'aménagement, l'installation ou les travaux en cause en conformité avec les dispositions dont la méconnaissance a été constatée, y compris, si la mise en conformité l'impose, en procédant aux démolitions nécessaires ».
Il précise également que « Cette mise en demeure peut être assortie d'une astreinte, prononcée dès l'origine ou à tout moment après l'expiration du délai imparti par la mise en demeure, s'il n'y a pas été satisfait, en ce cas après que l'intéressé a de nouveau été invité à présenter ses observations ».
Le Conseil d’Etat suit, ainsi, les conclusions de son rapporteur public, M. Arnaud SKZRYERBAK, qui avait relevé que « L’article L. 481-1 serait considérablement vidé de sa substance si les mesures ordonnées sur son fondement ne pouvaient pas inclure une démolition ». Précisant qu’inclure cette possibilité ne serait pas inédite dans la mesure où le maire détient de son pouvoir de police générale la compétence pour démolir un immeuble présentant un danger pour la sécurité publique.
On notera que le juge suprême précise que la démolition ne peut être ordonnée que « si la mise en conformité l'impose ».
Il annule, par conséquent, l’ordonnance du juge des référés prononçant la suspension de l’arrêté litigieux, jugeant que celui-ci a commis une erreur de droit en se bornant au fait que la mise en demeure prescrivait une démolition même partielle.
La démolition, totale ou partielle, peut donc être une des mesures prescrites sous astreinte par le maire, lorsqu’une infraction à une autorisation d’urbanisme ou déclaration préalable de travaux a été constatée, pour régulariser et rendre conformes les travaux réalisés.
Le conseil d’Etat confirme ainsi que les maires et les autorités compétentes en matière d’urbanisme peuvent envisager une troisième voie, autre que l’action pénale ou civile, pour contraindre les auteurs d’infractions aux règles d’urbanisme à mettre en conformité les constructions qu’ils ont irrégulièrement réalisées.