Le Conseil d’État a rendu deux arrêts intéressants le 23 novembre dernier concernant l’application de l’article R.431-13 du code de l’urbanisme qui disposent que « Lorsque le projet de construction porte sur une dépendance du domaine public, le dossier joint à la demande de permis de construire comporte une pièce exprimant l'accord du gestionnaire du domaine pour engager la procédure d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public ».
Le premier concerne le pourvoi en cassation enregistré sous le numéro 450008 et formulé contre le jugement du Tribunal administratif qui, dans le cadre du recours pour excès de pouvoir à l’encontre d’un permis de construire d’un immeuble collectif et de commerces après démolition d’un premier et de son permis modificatif, sursis à statuer sur le fondement de l’article L.600-5-1 du code de l’urbanisme et enjoint à la commune et la société pétitionnaire de justifier d’un permis de régularisation pour rendre conforme le projet de construction au PLU.
Le moyen examiné par le juge et qui nous intéresse principalement, concerne celui du défaut d’accord du gestionnaire du domaine public dans la demande de permis de construire déposée.
Alors que le Tribunal Administratif a jugé que les dispositions de l’article R.431-13 du code de l’urbanisme ne s’appliquaient pas en l’espèce puisque les balcons projetés ne compromettaient pas l’affectation du trottoir et n’en excédaient pas le droit d’usage du fait de leurs dimensions, le Conseil d’État en fait une analyse différenciée.
Il juge, en effet, qu’il résulte de ces dispositions que le seul fait pour la construction projetée de contenir des éléments qui surplombent une dépendance du domaine public suffit à les mettre en jeu et à exiger la production de l’accord du gestionnaire du domaine public pour engager la procédure d’autorisation d’occupation temporaire du domaine public dans la demande de permis de construire.
De sorte, que le défaut de document exprimant l’accord du gestionnaire du domaine public pour engager la procédure d’autorisation d’occupation temporaire du domaine public dans le dossier de demande de permis de construire d’un projet surplombant le domaine public empêche la délivrance d’un permis de construire valable, le dossier étant tout simplement incomplet.
Le second arrêt n°449443 concerne une même configuration.
Par un premier jugement le Tribunal administratif a, dans le cadre du recours pour excès de pouvoir à l’encontre d’un permis de construire d’un immeuble collectif, d’un local commercial et de stationnements, sursis à statuer sur le fondement de l’article L.600-5-1 du code de l’urbanisme et enjoint à la commune et la société pétitionnaire de régulariser les vices affectant l’arrêté de permis de construire pris. Il a notamment pour cela estimé que les dispositions de l’article R.431-13 du code de l’urbanisme avaient été méconnues dans la mesure où les sociétés pétitionnaires ne disposaient d’aucun droit sur le domaine public leur permettant de prévoir les aménagements projetés sur celui-ci, faute de déclassement ou de vente de la parcelle concernée et n’avaient donc pas qualité pour déposer une demande de permis de construire.
Suite à la régularisation intervenue, un second excès de pouvoir a été introduit, entrainant l’annulation de ce permis régularisé.
Après avoir précisé que l’annulation du permis régularisé n’empêchait pas le juge suprême d’analyser le premier pourvoi, ce dernier analyse les moyens invoqués et notamment celui qui nous intéresse ici, concernant la méconnaissance des dispositions de l’article R.431-13 du code de l’urbanisme.
Il considère à cet égard et à l’instar de l’arrêt n°450008, que pour juger de la qualité du demandeur d’un permis de construire pour des constructions portant sur une dépendance du domaine public, à défaut de déclassement ou de vente de la parcelle concernée, le tribunal ne doit vérifier qu’uniquement la présence ou non dans le dossier de demande de permis de construire du document exprimant l’accord du gestionnaire du domaine public pour engager la procédure d’autorisation d’occupation temporaire du domaine public.
Ainsi, le Conseil d’État confirme le caractère obligatoire d’un tel accord et sa suffisance.
Il n’est donc pas nécessaire pour obtenir un permis de construire qui contiendrait des éléments avec une emprise ou un surplomb sur le domaine public que le pétitionnaire justifie d’un titre l’autorisant à occuper le domaine public mais seulement qu'il joigne à son dossier l’accord du gestionnaire du domaine public pour engager ladite procédure d’autorisation. L’absence de cette pièce ne permettant, en conséquence, pas à l’autorité instructrice de délivrer valablement l’autorisation d’urbanisme sollicitée, cette dernière encourant alors l’annulation.